|
|
N� 1994-05 |
  |
Juillet |
Turquie : d'une stabilisation � l'autre |
Isabelle Bensidoun |
|
Faute d'avoir réagi à temps
aux chocs externes subis au milieu des années soixante-dix, la Turquie
s'est trouvée précipitée en 1977 dans une grave crise des
paiements. Après deux années de vaines tentatives de redressement,
elle s'est engagée en 1980 dans un programme de réformes en profondeur.
La stratégie de développement s'est alors fondée sur l'ouverture
extérieure et les mécanismes de marché. Ce programme a bénéficié,
au moment de sa mise en oeuvre, d'un environnement particulier qui a permis à
la fois d'atténuer la rigueur de la stabilisation et de faciliter le développement
des exportations.
L'allégement de la dette extérieure, l'afflux de capitaux de
sources officielles et multilatérales, et les envois de fonds des travailleurs
émigrés ont permis de desserrer la contrainte financière
externe. Ainsi, contrairement aux autres pays très endettés, la
Turquie n'a pas été confrontée à un retournement
des transferts nets de ressources dans les premières années de
la mise en place du programme de stabilisation. Le recours à la taxe
d'inflation a pu être limité. Quant aux exportations, leur développement a bénéficié
de deux facteurs : l'existence d'une base industrielle solide héritée
des années de politique d'industrialisation par substitution aux importations
; l'intérêt qu'ont pu trouver l'Iran et l'Irak en 1980 aux échanges
avec la Turquie.
La mise en place de politiques encourageant le développement des exportations
a permis d'exploiter ces facteurs favorables. La politique de stabilisation
conduisant à une réduction de la demande interne, les producteurs
étaient incités à trouver des débouchés sur
les marchés exterieurs. Les dépréciations régulières
du taux de change assuraient l'amélioration de la compétitivité-prix,
et le secteur exportateur était vivement encouragé par un traitement
préférentiel (allègements fiscaux, crédits à
des taux préférentiels, allocations de devises...). Le résultat
recherché par ces différentes mesures a été rapidement
atteint.
De manière surprenante, cette évolution des exportations ne
s'est pas accompagnée d'une dynamique de l'investissement. Dans le secteur
des biens échangeables, celui-ci a même stagné, réduisant
sa part dans la formation de capital des secteurs public et privé. L'atmosphère
d'instabilité macroéconomique a joué un rôle non
négligeable dans cette faible performance. Restaurer la confiance, pour
assurer une reprise de l'investissement, réclame de s'attaquer sérieusement
au problème des finances publiques. En effet, suite aux politiques de
rigueur mises en oeuvre dans le cadre de la stabilisation, la Turquie a connu,
au début de la décennie quatre-vingt, une courte période
de maîtrise des comptes publics. Par la suite, le déficit s'est
considérablement détérioré. Dans le même temps,
l'inflation a progressé. Les travaux empiriques indiquent que la hausse
des prix a été imputable aux niveaux élevés des
déficits publics et à leur monétisation. En l'absence de
stabilisation, les politiques de promotion des exportations et de libéralisation
financière ont aggravé la situation. Ainsi, pour revenir à
un taux d'inflation plus raisonnable, une réduction drastique du besoin
de financement du secteur public est indispensable. Celle-ci n'ayant pas eu
lieu, bien au contraire, les agences de notation américaines ont rétrogradé
la Turquie au début de l'année 1994. Cette décision s'est
traduite par une crise de confiance qui a contraint la Banque centrale à
dévaluer la Livre à deux reprises. Face à cette situation,
le Premier ministre s'est enfin décidé à s'attaquer sérieusement
au problème qui mine l'économie turque. Le plan de stabilisation,
annoncé le 5 avril, devrait permettre, s'il est réellement mis
en oeuvre, d'assainir l'économie. |
Texte intégral
(pdf) |
|
|
|
Mots-clés |
|
Classification JEL |
Pour afficher le texte intégral, utilisez Acrobat
Reader |
|
|
|
|
|
|
|
|