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N� 2007-14 |
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Août 2007 |
Mondialisation des services :
de la mesure à l’analyse |
Isabelle Bensidoun Deniz Ünal |
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Avec la création de l’Organisation mondiale du commerce, le champ de la libéralisation
internationale a été étendu aux services qui représentent 70% de la valeur ajoutée et 40% de
l’emploi dans le monde. Les modalités de leur ouverture sont consignées dans l’Accord
général sur le commerce des services (GATS, 1995). Tous les modes de fourniture
internationale de services sont concernés. Au commerce stricto sensu entre résidents et non
résidents (modes 1 et 2 enregistrés en balance de paiements), le GATS ajoute ainsi l’activité des filiales étrangères dans les pays d’accueil (mode 3) et les prestations effectuées par le
déplacement de personnes physiques à l’étranger (mode 4). Avec le développement des
technologies de l’information et de la communication beaucoup de services, réputés nonéchangeables,
peuvent désormais franchir les frontières (mode 1). Mais la proximité physique du prestataire et du client continue d’être nécessaire ou préférable dans bien des
cas et favorise l’implantation de filiales à l’étranger (mode 3). C’est à l’évaluation de ces
différents modes d’échanges que nous nous attachons dans un premier temps.
Comme prérequis à chacune des séries de négociations, l’article XIX du GATS charge le
Conseil, composé des représentants des pays membres, de procéder à une évaluation à la
fois globale et sectorielle du commerce de services. Depuis le début des années 1990, des
efforts ont été entrepris par les grandes institutions internationales pour parvenir à une
information statistique détaillée et cohérente au niveau mondial. Mais il reste d’importantes
lacunes dans ce domaine, particulièrement pour les deux modes d’échanges de services qui
ne relèvent pas du commerce au sens strict. Tout d’abord, les données concernant le mode 3
ne sont disponibles que pour certains pays de l’OCDE. Ainsi les estimations de
l’importance respective des quatre modes d’échanges faites par Karsenty (2002), et
fréquemment reprises, sont assez sommaires : elles extrapolent, au niveau mondial, des
données relatives à quelques pays développés sans préciser les hypothèses sous-jacentes.
Ensuite, les données relatives au mode 3, établies selon une nomenclature d’activités, ne
sont pas directement comparables à celles relatives aux modes 1 et 2, basées sur une
classification par produits. En nous limitant à quatre grands pays de l’OCDE (Etats-Unis,
Japon, Allemagne, France) pour lesquels les données sont les plus complètes, nous
proposons ici une estimation qui permet de rapprocher les deux séries de données. Ceci
nous amène à réduire substantiellement les ventes de services réalisées par les filiales du
secteur « commerce » et, ce faisant, à diminuer très sensiblement les échanges selon le
mode 3. Néanmoins, ce mode reste dominant dans l’ensemble des échanges de services :
l’implantation de filiales constitue pour les quatre pays le moyen privilégié de servir les
marchés étrangers. La décomposition géographique des échanges effectués selon le mode 3
montre que ces marchés se situent essentiellement au Nord, de même que les filiales
installées dans ces quatre pays appartiennent en très grande majorité à des firmes du Nord.
Cette domination du Nord s’observe aussi dans le commerce de services au sens strict que
nous analysons ensuite en utilisant la base CHELEM-BAL du CEPII. Cette base de données, construite à partir des statistiques du FMI, est complétée par celles de l’OCDE et
par des déclarations nationales pour parvenir à une couverture particulièrement exhaustive
des échanges en onze grandes catégories de services et 184 pays. Les pays du Nord assurent
81% des exportations mondiales de services et 86% de celles de services hors transports et
voyages (les « autres services »). Cette dernière catégorie comprend les postes de services
dont les échanges ont le plus progressé au cours des dix dernières années (services
d’informatique et information, services financiers, services d’assurance, redevances et
droits de licence, services culturels). Alors que la part de l'ensemble des services dans le
total des échanges mondiaux n'a guère évolué au cours des trois dernières décennies, c’est
dans ces activités que la mondialisation des services s’intensifie.
La progression très rapide des « autres services » (aujourd'hui la moitié des échanges dans
le tertiaire), a été favorisée par les progrès des technologies de l’information et de la
communication qui ont enlevé l’obstacle posé par la distance au commerce de certains
services. Cette évolution offre aux pays du Sud, pour qui l’implantation de filialesà l’étranger est difficile, la possibilité de participer à la mondialisation des services. Mais,
pour le moment, seule l’Inde a réussi à conquérir des parts de marché importantes, dans les
services d’informatique et d’information. Les nouveaux domaines restent encore l’apanage
des pays du Nord, particulièrement des Etats-Unis et du Royaume-Uni dont la
spécialisation est particulièrement marquée dans ces secteurs dynamiques.
L’analyse de la mondialisation des services reste, en dépit de l’amélioration de l’appareil
statistique, limitée par l’insuffisance des données. La modalité la plus utilisée pour fournir
des services au niveau international est celle pour laquelle les informations statistiques sont
les plus lacunaires et les plus hétérogènes. Alors même que la libéralisation des services est,
parce qu’elle s’attaque d’emblée aux réglementations intérieures, plus complexe que ne l’a
été celle des biens, les défauts d’informations sur les échanges pourraient constituer une
source supplémentaire de difficultés dans l’avancée des négociations. |
Résumé
non-technique
Texte intégral 
English version |
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Services ; commerce international ; spécialisation ; FATS |
Mots-clés |
F10, F14, F23, L80 |
Classification JEL |
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