L’union bancaire : une pièce maîtresse pour la résolution de la crise
Retranscription écrite de l'émission du 13 septembre "Les idées claires d'Agnès Bénassy Quéré", chronique hebdomadaire sur France Culture le jeudi matin à 7h38
Par Agnès Bénassy-Quéré
Audio du 13 septembre 2012
Chacun ses goûts en matière d’actualité. Hier, j’ai pris beaucoup d’intérêt, sur internet, à la conférence de presse de Michel Barnier, Commissaire européen au marché intérieur, qui présentait à Bruxelles les premières propositions pour une union bancaire.
Chers auditeurs, il ne vous a pas échappé que plusieurs pays de la zone euro ont de gros ennuis avec leurs banques. En septembre 2008, le gouvernement irlandais a étourdiment garanti une grosse partie des dettes bancaires du pays pour rassurer les marchés. Hélas, les banques se sont révélées en piteux état. L’affaire a coûté 40% du PIB à l’Etat irlandais qui, comme on le sait, a été secouru par les Européens. En juin 2012, rebelote, le gouvernement espagnol tente de sauver Bankia mais n’en a pas les moyens ; les Européens débloquent 100 milliards pour recapitaliser les banques espagnoles. Pourtant, entre les deux dates, cependant, les esprits ont évolué. Le spectre de Lehman Brother s’est estompé, les caisses se sont vidées, les coupes budgétaires se sont succédé, les impôts ont augmenté, le chômage a explosé, le mécontentement s’est généralisé. Pourquoi sauver les banquiers plutôt que les ouvriers de l’industrie ou les contribuables ? Le message a été entendu : seules les banques viables pourront recevoir de l’argent européen, et encore, uniquement après contribution de leurs actionnaires et de leurs créanciers.
Or l’Espagne est en réalité le laboratoire d’une démarche bien plus ambitieuse répondant au doux nom d’union bancaire. Les grandes lignes ont été fixées en juin ; Michel Barnier vient d’en détailler l’acte 1. Si le projet est voté, la surveillance des 6 000 banques de la zone euro passera sous la responsabilité de la Banque centrale européenne, qui vérifiera qu’elles sont correctement capitalisées, accordera ou retirera les licences bancaires, distribuera des amendes si nécessaire. L’autorité bancaire européenne, à Londres, continuera de fixer les règles du jeu au niveau de l’Union européenne, tandis que la BCE surveillera leur application dans la zone euro. Les banques pourront être recapitalisées directement par les européens lorsqu’elles sont solvables, mais dans le cas contraire, seront restructurées, vendues - comme de vieux clous – en pièces détachées, ou tout bonnement fermées. A moyen terme, un fonds de résolution des crises sera mis en place, alimenté par les banques elles-mêmes, de façon à ne pas solliciter les contribuables. A ce fonds pourra être adjoint un système de réassurance des dépôts pour mieux sécuriser nos bas de laine.
L’union bancaire est souvent considérée comme une pièce maîtresse pour résoudre durablement la crise, l’idée étant de couper le lien incestueux entre banques (qui détiennent la dette publique) et Etats (qui s’endettent pour renflouer leurs banques). Certes, des interrogations majeures subsistent, comme la difficulté pour la BCE d’abandonner une banque au bord de la faillite sans provoquer une nouvelle crise, ou bien de relever ses taux d’intérêt si le risque d’inflation revient alors même que la crise bancaire n’est pas résolue ; et puis, l’union bancaire implique une forme de mutualisation des risques, donc d’union budgétaire, donc d’union politique. Mais enfin, on attaque le mal à sa racine, même si nous ne sommes pas au bout de nos peines.
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