Depuis une vingtaine d’années, les observateurs relèvent une croissance des conséquences économiques et sociales d’événements dommageables telles que les catastrophes naturelles, les accidents industriels ou les actes de malveillance. Dans les pays de l’OCDE, cette montée en ordre de grandeur des conséquences dommageables est plutôt d’ordre économique (Andrew en Floride en 1992 : 20 milliards de $ de dommages assurés ; 9 septembre 2001 : 45-55 milliards de $). Elle s’accompagne de la montée en puissance de risques non « conventionnels » : sanitaires, technologiques, atteintes à la sécurité... Ce nouveau contexte pose des questions redoutables aux acteurs.
Favorisée par différents facteurs (démographie, concentration géographique des actifs, pression économique sur les résultats, etc..) cette amplification peut-elle continuer et jusqu’où est-elle soutenable ou acceptable (100 milliards d’Euros de dommages assurés, 200, 300 ?). Quand ce risque de récession localisée ou mondiale devient-il inévitable ? Les conséquences étant d’ordres macro-économiques pour les uns, budgétaires pour les États, bilancielles pour les assureurs ou les entreprises, socio-économiques pour les citoyens ou les consommateurs, de court terme, de long terme, quels partages de responsabilités, quelles conditions de continuité socio-économique, quelles préférences entre prévention et compensation ?
La problématique économique des grands risques ne se ramènerait donc pas à une économie de l’assurance. Quelles parts représentent la situation économique des Etats nations, la géographie, le cadre réglementaire, les régimes de responsabilités civiles, le système judiciaire ou les marchés financiers, les héritages du passé, l’aversion face aux risques ou le niveau d’Etat providence, dans une économie des grands risques ? L’État est-il un régulateur ou garant de dernier ressort ? S’il ne l’est pas, ne peut plus ou ne veut plus l’être pour une part significative des dommages liés aux grands risques, l’entreprise peut rechercher à transférer les risques sur les assureurs et in fine les réassureurs. Peut-elle le faire dans le nouveau ou futur contexte : risques « conventionnels » trop coûteux à assurer, risques « nouveaux » inassurables ? Si une telle impasse se concrétisait, ce serait une cause rampante et durable de sous optimisation des facteurs de production et probablement d’anomie économique ou de récession. De plus si une zone économique était en mesure d’apporter des solutions et pas une autre, la question de la compétitivité et de l’attractivité se poserait elle ?
In fine, face à une configuration de risques différentes, y a-t-il des réponses idéales : comportements vertueux ou prudentiel des acteurs, régimes des responsabilités civiles et judiciaires plus en phase avec un nouveau partage des risques, capacités quantitative et qualitative de l’assurance mieux calibrées, rôle des États et de la communauté internationale plus adapté, juste place accordée à l’anticipation et à la prévention, recours aux partenariats publics privés ?
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