La crise de la zone euro vue d'Asie
Retranscription écrite de l'émission du 15 décembre "Les idées claires d'Agnès Bénassy Quéré", chronique hebdomadaire sur France Culture le jeudi matin à 7h38.
Par Agnès Bénassy-Quéré
Ce n’est pas très drôle en ce moment pour un économiste européen de voyager hors d’Europe. On se fait constamment alpaguer sur le thème « quand est-ce que vos gouvernements vont enfin se décider à résoudre cette crise ? ». Pas un mot de commisération. Rien que de la critique et de l’impatience.
C’est spécialement le cas en Asie d’où je reviens. Il faut dire que les Asiatiques gardent un souvenir douloureux de la crise qui les a secoués en 1997-98. Ils ont l’impression que le Fonds monétaire international est beaucoup moins dur envers les Européens aujourd’hui que naguère envers eux. C’est bien la preuve que les Européens dominent le FMI et ceci doit changer. « Voulez-vous que nous contribuons à la résolution de la crise ? Faites donc le ménage dans vos économies et donnez-nous plus de pouvoir au FMI. Ensuite, nous verrons ». Voilà pour les principes.
Mais la réalité s’accommode mal des principes. La crise européenne assombrit dangereusement les perspectives de croissance en Asie comme ailleurs. L’Europe est un partenaire commercial de poids. Qu’elle entre en récession, et les exportations asiatiques souffriront. Les investissements européens dans la région tariront, tandis que le Japon subira de nouvelles pertes de compétitivité si les investisseurs fuient l’euro pour le yen, perçu comme plus sûr. Plus généralement, les Asiatiques n’ont pas intérêt à une disparition de l’euro car cela les laisserait seuls face à la puissance américaine. Ils perçoivent l’euro comme un élément pacificateur et stabilisateur. Sans euro, c’est sûr, le dollar continuera à dominer le système monétaire international, ce qui ne les arrange pas.
Alors, comment aider ? Le sommet européen de la semaine dernière ouvre peut-être une voie. Si la Banque centrale européenne accepte de prêter 200 milliards d’euros au FMI, il est probable que le Japon et la Chine contribueront aussi au sauvetage de la zone euro, via le FMI qui en supportera les risques. A cette occasion, la zone euro devra sans doute réduire sa représentation au Fonds pour laisser plus de place aux grandes économies émergentes. C’est donnant-donnant. Mais il n’y a pas que cela. En effet, les Européens peuvent faire tout le ménage qu’on veut dans leurs économies, retirer les tapis et sortir les poubelles, ces efforts sont voués à l’échec en l’absence de croissance. Or, ayant bâillonné la demande intérieure, ils ne pourront compter que sur la demande extérieure. Suivez mon regard. Plus de consommation en Chine, plus d’investissement dans les autres pays asiatiques, et une ouverture plus franche de ces marchés aux produits et services européens. La Chine est très directement concernée. Elle semble bien lente à abandonner son modèle de croissance fondé sur l’exportation et la sous-évaluation de sa monnaie. Et il est toujours aussi compliqué d’accéder au marché chinois.
Hélas, je crains que les Chinois ne continuent à considérer l’Europe comme un marché à sécuriser plus que comme un fournisseur à accueillir. Marc, il faut exporter Les Idées Claires en Chine.
C’est spécialement le cas en Asie d’où je reviens. Il faut dire que les Asiatiques gardent un souvenir douloureux de la crise qui les a secoués en 1997-98. Ils ont l’impression que le Fonds monétaire international est beaucoup moins dur envers les Européens aujourd’hui que naguère envers eux. C’est bien la preuve que les Européens dominent le FMI et ceci doit changer. « Voulez-vous que nous contribuons à la résolution de la crise ? Faites donc le ménage dans vos économies et donnez-nous plus de pouvoir au FMI. Ensuite, nous verrons ». Voilà pour les principes.
Mais la réalité s’accommode mal des principes. La crise européenne assombrit dangereusement les perspectives de croissance en Asie comme ailleurs. L’Europe est un partenaire commercial de poids. Qu’elle entre en récession, et les exportations asiatiques souffriront. Les investissements européens dans la région tariront, tandis que le Japon subira de nouvelles pertes de compétitivité si les investisseurs fuient l’euro pour le yen, perçu comme plus sûr. Plus généralement, les Asiatiques n’ont pas intérêt à une disparition de l’euro car cela les laisserait seuls face à la puissance américaine. Ils perçoivent l’euro comme un élément pacificateur et stabilisateur. Sans euro, c’est sûr, le dollar continuera à dominer le système monétaire international, ce qui ne les arrange pas.
Alors, comment aider ? Le sommet européen de la semaine dernière ouvre peut-être une voie. Si la Banque centrale européenne accepte de prêter 200 milliards d’euros au FMI, il est probable que le Japon et la Chine contribueront aussi au sauvetage de la zone euro, via le FMI qui en supportera les risques. A cette occasion, la zone euro devra sans doute réduire sa représentation au Fonds pour laisser plus de place aux grandes économies émergentes. C’est donnant-donnant. Mais il n’y a pas que cela. En effet, les Européens peuvent faire tout le ménage qu’on veut dans leurs économies, retirer les tapis et sortir les poubelles, ces efforts sont voués à l’échec en l’absence de croissance. Or, ayant bâillonné la demande intérieure, ils ne pourront compter que sur la demande extérieure. Suivez mon regard. Plus de consommation en Chine, plus d’investissement dans les autres pays asiatiques, et une ouverture plus franche de ces marchés aux produits et services européens. La Chine est très directement concernée. Elle semble bien lente à abandonner son modèle de croissance fondé sur l’exportation et la sous-évaluation de sa monnaie. Et il est toujours aussi compliqué d’accéder au marché chinois.
Hélas, je crains que les Chinois ne continuent à considérer l’Europe comme un marché à sécuriser plus que comme un fournisseur à accueillir. Marc, il faut exporter Les Idées Claires en Chine.