Financement de la transition écologique : où est le problème ?
Jézabel Couppey-Soubeyran
Wojtek Kalinowski
Le contraste est saisissant entre, d’un côté, la surabondance d’actifs financiers au bilan des institutions financières de toute sorte (banques, assureurs, fonds d’investissement, fonds de pension, etc., y compris les banques centrales) et, de l’autre, le sous-investissement dans la transition écologique. Les 486 600 milliards de dollars d’actifs (cinq fois le PIB mondial), recensés par le Financial Stability Board dans son rapport d’octobre 2022 sur l’intermédiation financière, coexistent avec un besoin d’investissements dans la transition écologique de l’ordre de 5 000 milliards de dollars par an au niveau mondial d’ici à 2030, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Est-ce à dire que l’argent ne manque pas pour financer la transition et qu’il suffit de le réorienter au bon endroit en donnant aux investisseurs les bonnes incitations ? Cette vision est séduisante et assez largement répandue dans le débat public, mais elle pose plusieurs questions. Tout d’abord, est-ce que l’on prend bien la mesure de ce qu’il en coûte, non seulement de s’adapter au changement climatique, mais aussi de l’atténuer, et de ce qu’il en coûte d’opérer une transition écologique qui soit également une transition juste ? Ensuite, suffira-t-il de réorienter les financements privés, qui jusqu’ici n’y sont pas parvenus spontanément ? La faisabilité de cette réorientation n’est-elle pas surestimée ? Ne sous-estime-t-on pas, au contraire, la part des financements publics nécessaires pour prendre en charge la part des investissements ou dépenses indispensables mais non rentables, là où précisément la finance privée n’ira pas ? Enfin, s’il faut mobiliser davantage les finances publiques, comment y parviendra-t-on sans buter sur des contraintes budgétaires ? [...]
Jézabel Couppey-Soubeyran
Wojtek Kalinowski
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