La fin de la politique de taux zéro aux États-Unis devra se faire de manière progressive
La Réserve Fédérale a encore reporté lors de sa réunion de septembre sa décision de sortie de la politique monétaire de taux zéro pourtant maintes fois annoncée. Mais finalement, la question du comment sortira-t-on de cette politique n'est elle pas plus importante que celle du quand ?
Par Stéphane Lhuissier, Fabien Tripier
Billet du 18 septembre 2015
Jeudi 17 septembre 2015, lors de sa réunion mensuelle, le Comité Fédéral d’Open Market (FOMC) de la Réserve Fédérale a décidé de maintenir le taux directeur des fonds fédéraux à son niveau historiquement bas, soit à la fourchette cible de 0-0,25, conservant ainsi la politique monétaire accommodante dite de "taux zéro" mise en place fin 2008.
Néanmoins, Janet Yellen, Présidente du Comité, a pris soin de rappeler que la plupart des membres du FOMC continuaient de penser que les conditions économiques d’une hausse des taux seraient réunies plus tard dans l’année[1]. Cette déclaration confirme l’hypothèse d’un prochain relèvement des taux, mais reporte à la prochaine réunion d'octobre du FOMC d’éventuelles informations supplémentaires sur la date de ce changement. Mais, finalement, la question du "quand" est peut être moins importante que celle du « comment ». C'est en tout cas le point de vue de Janet Yellen pour qui compte davantage l'ensemble de la trajectoire du taux d'intérêt que le moment de sa hausse initiale :
Néanmoins, Janet Yellen, Présidente du Comité, a pris soin de rappeler que la plupart des membres du FOMC continuaient de penser que les conditions économiques d’une hausse des taux seraient réunies plus tard dans l’année[1]. Cette déclaration confirme l’hypothèse d’un prochain relèvement des taux, mais reporte à la prochaine réunion d'octobre du FOMC d’éventuelles informations supplémentaires sur la date de ce changement. Mais, finalement, la question du "quand" est peut être moins importante que celle du « comment ». C'est en tout cas le point de vue de Janet Yellen pour qui compte davantage l'ensemble de la trajectoire du taux d'intérêt que le moment de sa hausse initiale :
« Let me again emphasize that the specific timing of the initial increase in the target range for the federal funds rate is far less important for the economy than the entire expected path of interest rates. »
Transcript of Chair Yellen’s FOMC Press Conference Opening Statement, September 17, 2015.
Transcript of Chair Yellen’s FOMC Press Conference Opening Statement, September 17, 2015.
Pour illustrer l'importance de cette trajectoire, nous utilisons un modèle statistique de prévision de la conjoncture américaine à partir des anticipations des opérateurs[2]. Nous utilisons ici les données d’enquêtes auprès des intervenants sur le marché des fonds fédéraux (primary dealers ) réalisées par la Réserve fédérale de New York pour définir la trajectoire future du taux directeur de la politique monétaire américaine. Dans le scénario de référence, correspondant aux anticipations moyennes de ces professionnels, le taux d’intérêt évoluerait de la manière suivante durant les six prochains trimestres : 0,25% (T1), 0,50% (T2), 0,75% (T3), 1,00% (T4); 1,13% (T5) et 1,63% (T6). Selon ce scénario, l'activité économique ne devrait pas connaître de ralentissement marqué durant les prochains trimestres avec des taux de croissance de l'indice de la production industrielle en 2016 et 2017 supérieurs à celui prédit pour l'année 2015 (soit 2,42% en 2016 et 2,60% en 2017 contre 1,60% en 2015). De la même manière, le taux de chômage devrait continuer à diminuer, à un rythme ralenti, pour passer en dessous de la barre des 5% en 2016. Selon ce scénario, la sortie progressive de la politique de taux zéro ne serait pas un obstacle à la reprise économique.
NB : Les séries sont exprimées en taux annualisé.
Pour apprécier les effets d’une sortie plus rapide de la politique de taux zéro, nous simulons un second scénario, où le taux directeur est pour les quatre prochains trimestres 50 points de base au-dessus des anticipations du premier scénario : 0,75% (T1), 1,00% (T2), 1,25% (T3), 1,50% (T4). Cette politique plus restrictive donnerait lieu à un ralentissement notable de l'activité économique. Le taux de croissance de la production industrielle serait ralenti de 0,35 point en 2016 et de 0,5 point en 2017. La baisse du taux chômage serait moins prononcée.
Ces résultats montrent que même si la sortie de la politique monétaire de taux zéro est déjà anticipée par les agents, le choix de la trajectoire par la Réserve fédérale peut avoir des effets substantiels sur l’activité économique. Ceci plaide en faveur d’une sortie progressive de cette politique.
[1] « Most [FOMC] participants continue to expect that economic conditions will make it appropriate to raise the target range for the federal funds rate later this year ». Transcript of Chair Yellen’s FOMC Press Conference Opening Statement, September 17, 2015.
[2] Le modèle développé au CEPII est basé sur la méthodologie proposée par Waggoner et Zha (1999) « Conditional forecasts in dynamic multivariate models », Review of Economics and Statistics, 81(4), 639-651, voir le document de travail Cheysson, Lhuissier et Tripier « Financial Factors in Baysian Structural VAR Models » à paraitre.
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