Le changement de stratégie d’« exit » de la Fed devrait profiter aux pays émergents
Mercredi dernier, le comité de politique monétaire américain (FOMC) a décidé de ne pas changer la cible du taux des fonds fédéraux, actuellement entre 0,25 % et 0,50 %. Cette décision s’inscrit dans le prolongement de celles prises lors des précédentes réunions de janvier, mars et avril.
Par Stéphane Lhuissier, Fabien Tripier, Anatole Cheysson
La hausse « historique » de décembre 2015, mettant fin à sept années de ciblage de taux entre 0 % et 0,25 %, apparaît bien isolée et ne marquera pas finalement le début d’une phase de normalisation de la politique monétaire maintes fois annoncée. L’examen attentif des décisions du comité, notamment de ses prévisions, montre que nous n’assistons pas qu’à un simple report de la hausse des taux mais plutôt à une substantielle révision de la trajectoire de sortie de la politique de taux zéro préconisée par la banque centrale américaine.
En décembre 2015, les membres du FOMC préconisaient [1] d’élever le taux jusqu’à 1,30 % pour 2016. Mais le taux moyen observé sur les six premiers mois de 2016 est resté très en-deçà (0,36 %) compte-tenu des décisions du comité. Pour l’année en cours, le comité a revu ses préconisations et suggère désormais d’atteindre un taux de 0,83 %. La révision à la baisse de la cible de taux concerne également les années 2017 et 2018, voire même au-delà (voir graphique). Le rythme de progression des taux a aussi été révisé à la baisse. En décembre 2015, le comité préconisait de relever les taux de plus d’un point de pourcentage par an en 2016 et 2017 (1,30 % et 1,13 %, respectivement) contre seulement 0,80 % et 0,83 % en juin 2016. Au final, nous assistons à la fois à un report de la politique de relèvement des taux et à une atténuation marquée de la trajectoire qui devrait être suivie.
Cette décision de politique monétaire était très attendue, et pas uniquement aux États-Unis. En effet, par leurs impacts sur le dollar et les marchés financiers internationaux, ces décisions affectent l’ensemble de l’économie mondiale. Les économies émergentes sont particulièrement concernées et peuvent se révéler plus affectées par ces décisions que l’économie américaine elle-même. Dans une récente Lettre du CEPII, nous estimons qu’un relèvement rapide des taux d’intérêt américains pourrait coûter [2] un point de croissance aux pays émergents, contre un demi-point pour les États-Unis (le détail des résultats des simulations est consultable sur le site : http://visualdata.cepii.fr/).
Face à la conjoncture mondiale atone du moment, cette révision de la trajectoire de sortie de la politique de taux zéro aux États-Unis est plutôt une bonne nouvelle pour les économies émergentes. Elle pose néanmoins la question de la crédibilité des préconisations du comité de politique monétaire si systématiquement elles venaient à être révisées à la baisse.
En décembre 2015, les membres du FOMC préconisaient [1] d’élever le taux jusqu’à 1,30 % pour 2016. Mais le taux moyen observé sur les six premiers mois de 2016 est resté très en-deçà (0,36 %) compte-tenu des décisions du comité. Pour l’année en cours, le comité a revu ses préconisations et suggère désormais d’atteindre un taux de 0,83 %. La révision à la baisse de la cible de taux concerne également les années 2017 et 2018, voire même au-delà (voir graphique). Le rythme de progression des taux a aussi été révisé à la baisse. En décembre 2015, le comité préconisait de relever les taux de plus d’un point de pourcentage par an en 2016 et 2017 (1,30 % et 1,13 %, respectivement) contre seulement 0,80 % et 0,83 % en juin 2016. Au final, nous assistons à la fois à un report de la politique de relèvement des taux et à une atténuation marquée de la trajectoire qui devrait être suivie.
Cette décision de politique monétaire était très attendue, et pas uniquement aux États-Unis. En effet, par leurs impacts sur le dollar et les marchés financiers internationaux, ces décisions affectent l’ensemble de l’économie mondiale. Les économies émergentes sont particulièrement concernées et peuvent se révéler plus affectées par ces décisions que l’économie américaine elle-même. Dans une récente Lettre du CEPII, nous estimons qu’un relèvement rapide des taux d’intérêt américains pourrait coûter [2] un point de croissance aux pays émergents, contre un demi-point pour les États-Unis (le détail des résultats des simulations est consultable sur le site : http://visualdata.cepii.fr/).
Face à la conjoncture mondiale atone du moment, cette révision de la trajectoire de sortie de la politique de taux zéro aux États-Unis est plutôt une bonne nouvelle pour les économies émergentes. Elle pose néanmoins la question de la crédibilité des préconisations du comité de politique monétaire si systématiquement elles venaient à être révisées à la baisse.
Graphique – Les révisions successives de la stratégie d’ « exit » de la Fed |
Note : politique monétaire appropriée selon les participants au comité de politique monétaire lors des réunions de décembre 2015, mars 2016 et juin 2016 (valeur moyenne des 17 réponses calculée par les auteurs). Source : « FOMC participants' assessments of appropriate monetary policy », https://www.federalreserve.gov/monetarypolicy/fomccalendars.htm |
Pour en savoir plus :
« L’impact du resserrement monétaire américain sur les économies émergentes », La Lettre du CEPII, N°366, juin 2016, par Anatole Cheysson, Stéphane Lhuissier, Fabien Tripier.
Le site internet http://visualdata.cepii.fr/ accompagne cette Lettre et donne accès à la totalité des données utilisées et des simulations réalisées.
[1] Il s’agit ici de la moyenne des réponses des 17 membres du FOMC sur leur évaluation de la politique monétaire appropriée pour les années à venir et à long terme.
[2] Le travail empirique réalisé consiste à mesurer l’impact d’un choc monétaire exogène défini comme une variation de taux d’intérêt (ici une hausse) qui ne s’explique pas par une variation des fondamentaux de l’économie américaine ou la réaction de la banque centrale à cette variation.